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LUCIEN DANIEL, pionnier d'une viticulture bretonne septentrionale.

Dernière mise à jour : 8 oct. 2022


Le botaniste Lucien Louis Daniel (1856-1940) a consacré une bonne partie de ses recherches à l'étude de la greffe des végétaux, il est l'un des premiers à l'avoir étudié scientifiquement, la plupart des expériences qu'il a mis en place ont eu pour objectif de comprendre le fonctionnement de la greffe. On peut dire que son oeuvre est fondamentalement axé sur la greffe. Il a le soucie d’innover et d'améliorer les techniques. Son travail se situe à l'intersection entre la botanique et l'horticulture. "Dans son ouvrage de 1927, Lucien Daniel - le plus grand spécialiste mondial de la greffe avec le russe Mitchourine (1855-1935) - rassemble la plupart des techniques de greffage qui s'appliquent tant aux végétaux ligneux qu'aux plantes herbacées" (d'après Louis Albertini, La greffe végétale des origines à nos jours - La vigne phylloxérée sauvée par le greffage, communication présentée le 13 novembre 2014, Mémoires de l'Académie des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse, Volume 176, 19ème série-tome V, année 2015).

Il a commencé ses recherches par la pomologie, du fait de sa région d'origine (le Bas-Maine) et de son histoire familiale, son père était producteur de cidre dans le canton de Landivy (étrangement situé maintenant dans la zone IGP Cidre de Bretagne). Mais il est aussi connu pour ses travaux sur la vigne, il s'est intéressé à la crise viticole et notamment au Phylloxéra, et à la reconstitution du vignoble par le greffage. C'est un peu étonnant, puisqu' il a vécu surtout vers Rennes : il était maître de conférence en botanique appliquée à l'horticulture à la faculté des sciences de Rennes. Ce Haut-Breton d'adoption, très actif, est aussi le fondateur, en 1906, de la Société Bretonne de Botanique.


Il a fait des essais pour acclimater la vigne au nord de la Loire, et il recommandait pour le nord de la Bretagne la culture du cépage Baco noir (Baco 1 / 24-23 Baco), un hybride producteur direct précoce (5 jours avant le Chasselas) obtenu en 1902 par François Baco (1865-1947) à partir de la Folle blanche et de Riparia grand glabre.


Cela fait de L. Daniel un précurseur dans le développement et l'extension de la culture de la vigne au delà de sa limite traditionnelle en Bretagne, un renouveau après des siècles d'absence. Il n'avait pas l'ambition de produire un bon vin, mais un vin à eau-de-vie comme avec le Baco blanc pour l'Armagnac, ou de coupage (terme réservé aux vins ordinaires, on parle d'assemblage pour les grands vins, dans les deux cas c'est un mélange.). Son décès a fait l'objet d'un article en première page du journal L'Ouest-Éclair du vendredi 27 décembre 1940, où l'on souligne que : "pour le grand public, le souvenir de M. Lucien Daniel restera attaché à ses essais concluants sur l'acclimatation de la vigne au Nord de la Loire".


Son travail sur la viticulture Bretonne est même signalé dans la presse des pays que la France occupait. Dans "L'Afrique du Nord agricole" du dimanche 27 avril 1930 (éd. à Alger et Casablanca, supplément de L'Afrique du Nord illustrée, n° 469), on peut lire (page 18) sous la plume d'un colon : "Le professeur Lucien Daniel tente d'établir la culture de la Vigne en Bretagne.". Le "journaliste" était apparemment l'un de ces abrutis qui ignorent que la Bretagne possède un grand vignoble produisant un vin pourtant bien connu, probablement un futur fan du maréchal.


Lucien Daniel a aussi énormément travaillé sur le greffage et crise phylloxérique, et il a publié un ouvrage en trois fascicules sur "La question phylloxérique, le greffage et la crise viticole" (éd. Impr. de G. Gounouilhou, 1908-1911).


On a remarqué très tôt que la greffe abrégeait la durée de vie de la vigne, M. J. -M. Guillon, directeur de la Station viticole de Cognac, écrivait : "Une vigne greffée est une vigne qui vieillit plus vite. La soudure joue le même rôle d'obstruction que les diverses formations qu'on observe dans les canaux âgés. " (Influence des porte-greffes sur la qualité des vins, La Revue de Viticulture, 1904 ; Volume 21, page 384). "La longévité de nos nouveaux vignobles ne saurait atteindre celle de nos anciennes vignes franches de pied. Nos enfants ne verront plus nos vignes centenaires d'autrefois ; il est fatal que la sensibilité de nos nouvelles vignes greffées en entraînera le dépérissement relativement rapide" (Prosper Gervais, Président de l'Académie d'Agriculture, "La crise phylloxérique et la viticulture européenne", rapport présenté au VIIe congrès international d'agriculture à Rome, avril-mai 1903, éd. Impr. de l'unione cooperativa editrice, 1904 ; page 802 / Extrait de la Revue de Viticulture).

Éminent botaniste, spécialiste de la greffe et greffeur lui-même, il a été missionné en 1903 par le gouvernement pour évaluer l'impact des solutions proposées dans la lutte contre le Phylloxéra : Il a fini par mettre en garde la filière viticole contre la généralisation du greffage.


Il a notamment écrit :


"les vignerons ... purent croire un moment que la reconstitution était une grande œuvre quand en réalité c'est plutôt une œuvre grande par l'étendue des vignobles sur lesquels elle a porté et par l'étendue des désastres qu'elle a finalement causé et causera encore si l'on n'y prend garde" (La question phylloxérique, le greffage et la crise viticole", éd. Impr. de G. Gounouilhou, 1908-1911 ; fascicule 1, Introduction, page VIII).


"Si le greffage a vraiment rendu les vignerons maîtres absolus du développement de leurs vignes, comment se fait-il qu'il y ait tant de morts et de mourants dans les vignes greffées et que les remplacements soient plus fréquents que dans les mêmes vignes franches de pied ? Pourquoi éprouve t-on tant de difficultés, quand il s'agite de conduire les vignes greffées...?" (La question phylloxérique, le greffage et la crise viticole", éd. Impr. de G. Gounouilhou, 1908-1911 ; fascicule 1, page 126).


Ces mises en garde se vérifient de nos jours : environ 13 % du vignoble de l'Hexagone serait actuellement touché par les maladies du bois, c’est donc une préoccupation sanitaire et économique majeure des viticulteurs depuis l’interdiction de la seule molécule efficace contre l’esca (arsénite de soude). La technique de greffage la plus courante de nos jours est la greffe dite oméga, rapide car mécanisée, elle favoriserait les maladies du bois.



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