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  • Photo du rédacteurJosso

BAZH-GWERRANN / BOURG-DE-BATZ en 1862.



Dans la "Revue du monde catholique" (2ème année – Tome IV, éd. V. Palmé, 1862), on peut lire (page 307) dans des « Vignettes » de Louis Veuillot sur Batz et Guérande :


« Nous apercevons des clochers agrestes, nous rencontrons des attelages de bœufs, nous recevons le bonjour des paysans, nous voyons d’humbles fermes tapies dans les plis de terrain. Ce n’est pas beau encore, le pays paraît pauvre et nu. Des sables, point de bois ; de petites dunes arides cachent encore la mer ; mais l’air est libre, l’espace déjà vaste devient grand… on entend la note pure de l’oiseau, la note pure du vent, on entend le silence, c’est déjà la campagne ; les croix se multiplient, c’est déjà la Bretagne.


Ce canton, que l’on appelle encore l’Ile de Batz et que l’on croit avoir été jadis entièrement entouré par la mer, forme une enclave de la Bretagne bretonnante dans le cœur de la Bretagne nantaise, qui fut de bonne heure francisée. On y conserve encore la langue, les mœurs et le costume bretons… Les noms de lieux sont bretons. Le Pouliguen, où nous allons, signifie la petite baie blanche. Il dépendait de cette célèbre paroisse de Batz qui s’est bâtie une si belle église et qui portait de si beaux habits.


(page 308) D’un certain point de la route on aperçoit presqu’en même temps la mer, une vaste plaine où s’élèvent trois nobles clochers, celui du bourg de Batz, celui du Croisic et celui de Guérande, sur un coteau charmant. La mer est sans bornes, tachetée de petites voiles de pécheurs, et quelquefois une fumée de bateau à vapeur ondule au loin ; la plaine a ses prés verts, ses bouquets de bois, ses villages serrés autour des clochers, ses douces ondulations qui s’allongent comme des vagues immenses ; elle a surtout sa richesse propre, les marais étincelants qui la font ressembler à un prodigieux miroir à facettes.


Dans la saison du sel, sur les innombrables lisières des marais, s’élèvent des milliers de monticules de sel blanc, qui répandent une agréable odeur de violette ; on dirait des clous de diamants qui attachent les encadrements du gigantesque miroir. Tout cela est brillant et lumineux et vit de tous côtés.


A travers cet enchantement, nous arrivons au Pouliguen… (page 309) La population laborieuse est composée de pêcheurs, de paludiers et de cultivateurs. Souvent le même homme exerce ces trois professions, toutes trois très-nobles et nourrices de vigueur. Il va au marais dans la saison, il cultive son petit champ, il laboure aussi la mer… (page 544)


J'ai vu trois mariages le même jour au bourg de Batz. Les couples étaient fort bien, et les costumes irréprochables. On nous dit qu’une des mariées avait voulu innover, changer quelque chose aux couleurs traditionnelles, se donner même une crinoline. Elle le fit un peu et fut quasi sifflée. Les deux autres tinrent bon et en retirèrent grand honneur. L’une d’elles surtout, vaillante fille et de bonne race, voulut que les vieilles coutumes fussent observées à la rigueur, autant que l’époque le permet.


Nous lui rendîmes visite le lendemain, dans sa petite maison au bourg de Roffîat, qui forme comme un îlot de cabanes (page 545) au milieu des marais salants. Elle faisait la bouillie pour toute la famille de son mari réunie à la sienne : c’est la première chose qu’une nouvelle mariée doit faire, afin de prouver qu’elle saura nourrir ses enfants. Nous étions invités.


Quand la bouillie fut servie, nous causâmes. Nous retrouvâmes cette simplicité et en même temps ce savoir vivre, cette bonne grâce et cette discrétion gaie que j'ai si souvent admirés parmi les paysans…


L’un de nous avait amené un joueur de biniou célèbre dans tout le canton de Guérande. Ce musicien ne chante pas ; et son art ne le nourrissant point, il est en même temps cantonnier, et c’est tout ce qui reste par là des bardes bretons. Dès qu’on l'entendit, le village fut sur pied ; l’on accourut d’aussi loin que le vent portait. Quelques vieilles qui étaient déjà couchées se relevèrent. La danse commença incontinent. Cette danse, ou plutôt cette ronde, est un pas vif et rude, en avant, en arrière et de côté, qui se fait en tournoyant et en élevant les bras. Quand il n’y a pas de biniou, ce qui est l’ordinaire, – car la vague le biniou aussi s’en va, – on chante… Quand le biniou se fatigue, une voix s’élève, et cela n’a pas de fin, à moins que le jour vienne ou qu’il faille aller au marais. ».


La vie bretonne continue à Batz !





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