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HYDROMEL


La production de boissons fermentées est ancienne, et l'hydromel est sans doute la plus ancienne des boissons alcooliques (alcool obtenu par fermentation et non par ajout). L'hydromel a joué un rôle important dans les croyances et la mythologie de certains peuples, dont les Celtes.


Son nom traditionnel est "mez" en breton (vieux-breton : "med"), "medd" en gallois, et "mid" en vieil-irlandais, tous issus d'un proto-celtique "*medu" : hydromel) ; on trouve aussi le terme "dourvel / deurvel" (calque du mot "hydro-mel" : "dour / deur : eau + "mel" : miel), avec la forme "dourmèl" ( pour "dour mel" = eau de miel) chez Maunoir (1659).

Le celtique "*medu" vient du nom indo-européen du miel ("*médʰu) et de la boisson qui en est tirée. Le "Catholicon", dictionnaire breton trilingue (manuscrit de 1464 et incunable de 1499), donne "Mez... beuurage [breuvage]. fait deau et de miel." et "Mezu... yure [ivre]". Un vieux-breton "medot", forme dérivée de "med" et correspondant au moyen-gallois "meddawt" (> celtique "*medatu-"), signifiait "ivresse". L'étymologie apporte une profondeur historique, et montre la très grande ancienneté à l'association miel / hydromel.

Une autre racine indo-européenne désignait plus spécifiquement le miel : "*mel-i(-t)", elle a donné le grec "μέλι" (miel), le latin "mel" (miel) et le proto-celtique "*meli-" dont est issu le breton "mel" (miel), la gallois "mel" (miel) et le vieil-irlandais "mil" (miel). C'était une boisson très appréciée des Celtes comme en témoigne le mot dérivé en "-to-"("*melit-to-" > "*melitso-") du vieux nom indo-européen, qui a donné le celtique "*meliđđos" (doux, agréable ; avec la lettre "đ", dite "tau gallicium" : "t gaulois", pour rendre le groupe dental affriqué /t͡s/), d'où est issu le breton "melis" (mielleux, doux), le gallois "melys" (doux, agréable) et le vieil-irlandais "milis" (doux, agréable).


L'hydromel s'obtient par fermentation naturelle d'une dissolution aqueuse de miel, on peut penser que l'hydromel existe depuis que l'homme sait récolter le miel sauvage. C'est probablement par hasard que la découverte de l'hydromel a eu lieu, lorsque des chasseurs-cueilleurs ont découvert une ruche abandonnée au creux d'un arbre et remplie d'eau de pluie.


La production des boissons fermentées a été facilitée au Néolithique grâce aux récipients en poterie, ou autres. L'hydromel est bien attesté chez les Celtes au premier Age du Fer : on a retrouvé dans le sud-ouest de l'Allemagne (Hochdorf) la sépulture d'un prince celte contenant des cornes à boire en corne d’aurochs décorées d'une feuille d'or d'une contenance de plus de deux litres et un énorme chaudron en bronze d'une contenance de plus de 500 litres, les analyses chimiques et polliniques ont montré que ce récipient était plein d’hydromel au moment de la fermeture de la tombe, de quoi faire pour un grand festin avec de nombreux convives.


L'historien grec du Ier siècle avant notre ère Diodore de Sicile dit (Bibliothèque historique, livre V sur l'Europe, 34) : "l'hydromel [οἰνόμελι : vin de miel] est leur boisson, car le pays est riche en miel".


Avec l'hydromel, les Celtes de l'Âge du fer recherchaient aussi l'ivresse, une ivresse sacrée, la transe, qui permettait au consommateur de perdre le contact avec la réalité et de traverser la frontière existant entre le monde naturel et le monde surnaturel, et d'établir ainsi une connexion avec l'autre monde, les divinités et les ancêtres ("transe", déverbal de "transir", issu du latin "transire" : passer, traverser, être transféré). L'importance de l'hydromel comme boisson enivrante chez les Celtes se constate dans l'étymologie, où les noms de l' hydromel et de l'ivresse sont intimement liés, le mot celtique "meduos" (ivre, "mezv" en breton, "meddw" en gallois, "medb" en vieil-irlandais) est un dérivé préhistorique du nom de l'hydromel : "medu", que l'on retrouve dans le nom de la déesse "Meduna" (Ivresse), qui a survécu en Irlande dans le nom de la reine "Medb" (de l'adjectif féminin "*Meduā" : L'énivrante), l'une des figures féminines les plus emblématiques de la mythologie irlandaise.


Christophe M. JOSSO

© Tous droits réservés - 2021


Ci-dessous : le cratère de Hochdorf, culture de Hallstatt, vers 530-500 avant notre ère.


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