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L'ARMORIQUE

Dernière mise à jour : 9 déc. 2022

L’Armorique de l’Âge du Fer rassemblait l’ensemble des peuples celtiques occupant le littoral « situé dans les confins les plus éloignés de la Gaule » , c’est-à-dire le nord-ouest de l’espace celtique continental qui allait devenir la Gaule .


La forme ancienne et celtique du mot, « Aremorica », est composée d’un préfixe « are- » (signifiant « devant »), du nom « mori- » (signifiant « mer »), du suffixe déterminatif « -k- » et de la désinence casuelle « -a » (nominatif féminin), le mot se traduit donc par « la région qui fait face à la mer ». César donne d’ailleurs une définition précise des peuples celtiques « que l’on dit armoricains » : c’est « l’ensemble des cités qui touchent l’Océan » , qui sont « reliées à l’Océan » , définition parfaitement conforme à l’étymologie . Le sens du mot a été compris tardivement : le Glossaire d’Endlicher (ou ‘de Vienne’) est la copie du VIIIe siècle (Österreichische Nationalbibliothek, MS 89, fol. 189v) d’un manuscrit plus ancien (peut-être du Ve siècle), il contient une petite liste de vingt-sept termes gaulois intitulée : « De nominibus gallicis » (Sur les noms gaulois), suivis de leur traduction latine. Parmi eux on trouve le mot « aremorici » traduit « antemarini » (devant de mer) et analysé en « quia ‘are’ ante [devant], ‘more’ mare [mer], ‘morici’ marini » (marin, de mer).


Les éléments constituant ce mot étant panceltiques, le mot devait être transparent et compréhensible par tous les Celtes, il aurait donc pu être employé dans l’ensemble du monde celtique, mais son emploi concerne uniquement le territoire qui allait devenir la Gaule romaine. On pourrait donc limiter son usage à l’ensemble des peuples celtiques et maritimes continentaux limités par des populations ne parlant pas la même langue : les Germains au nord et les Aquitains au sud, c’est-à-dire de l’estuaire de l’Escaut (chez les Ménapes) à l’estuaire de la Gironde (chez les Bituriges Vivisques). Mais d’un côté, la Belgique constituait une région bien individualisée, les Belges eux-mêmes étaient conscients de leur appartenance à un même ensemble puisqu’ils se réunissaient en « assemblée commune des Belges » , et ils différaient des autres Celtes continentaux dans leur « façon de parler » selon César . De l’autre côté, on trouvait les Pictons, concurrents et même ennemis des Armoricains, au point de soutenir l’envahisseur romain contre les Vénètes.


Plusieurs peuples celtiques ont participé aux soulèvements organisés par les Vénètes, mais cela ne fait pas forcément d’eux des peuples armoricains, il ne s’agit que de coalitions de circonstance dans une période troublée et particulièrement difficile.

Comme indiqué au départ, César précise : « situé dans les confins les plus éloignés de la Gaule » , ce qui est sensé limiter considérablement l’étendue du territoire armoricain. On peut donc comprendre l’Armorique comme le territoire de l’ensemble des peuples maritimes du Massif Armoricain, et peut-être même de la péninsule armoricaine.

La péninsule armoricaine est située au centre de l’Europe atlantique, chacune des grandes périodes historiques montrent le lien évident qui unie l’Armorique aux autres régions de la façade atlantique. La Bretagne n’est un bout du monde, un « Finistère », que pour ceux qui ne comprennent pas l’importance de la mer dans les échanges commerciaux et dans l’économie des régions maritimes. La Manche, la Mer celtique et le Golf de Gascogne ont été une « mare nostrum » pour les populations riveraines, un espace traversé par des routes maritimes anciennes.


Le ligueur morlaisien Yves Gourmil, soutien actif de Philippe II d’Espagne, tient en 1592 des propos bien révélateurs de la perception qu’avaient les Bretons de cet atout, tout à fait dans le ton d’un empire du Milieu à l’échelle de l’Occident : « Il n’y a membre en tout l’Occident de si grande importance pour le regard des affaires générales du monde que… la possession de la Bretagne, pour autant qu’elle est située, comme un centre au milieu de sa circonférence, tant par mer que par terre, entre tous les états de l’Occidents, à savoir Espagne, France, Angleterre, Irlande, et tous les Pays-Bas. ».


La péninsule armoricaine est donc le passage obligé du trafic maritime entre Europe du nord et Europe du sud, les îles du Ponant marquant la limite entre les côtés nord et sud de l’espace maritime atlantique, on dit d’ailleurs en breton « mor kleiz » (mer gauche / du nord) et « mor dehoù » (mer droite / du sud) pour distinguer les parties septentrionales et méridionales de cette région maritime.

De par sa situation géographique stratégique, et son importance dans le commerce atlantique, la péninsule armoricaine constituait probablement une entité à elle toute seule, l'ancêtre de la Bretagne.


Christophe M. JOSSO

© Tous droits réservés - 2021


Ci-dessous : Österreichische Nationalbibliothek, MS 89, fol. 189v.


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