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LE BOTANISTE A. DE CANDOLLE EN BRETAGNE.


Augustin Pyrame de Candolle (1778-1541) était un botaniste suisse (Genève), il fut l'un des fondateurs de la géographie botanique en tant que discipline scientifique, il fut également un descripteur et classificateur du monde végétal.


En 1806, il reçut la mission du Ministère de l’Intérieur de parcourir tout l’Empire pour reconnaître l’état de l’agriculture et publia à son retour des rapports entre 1807 et 1813. Pour la Bretagne, il a visité les régions de Nantes, Vannes, Quimper et Rennes, mais c’est surtout le Morbihan qui est décrit, il ne parle donc pas des régions où l’agriculture est plus avancée comme dans le Léon ou le Pays de Rennes. Mis à part les propos racistes normales venant d’un serviteur d’un empire aussi civilisé, A. de Candolle a su parfaitement analyser et comprendre le système agraire traditionnel de la Bretagne, ce qui est très rare au XIXème siècle.


Dans 'Mémoire d’agriculture, d’économie rurale et domestique' (éd. Buisson, 1807, Tome 10), on trouve (page 228-292) son « Rapport sur un voyage botanique et agronomique dans les départements de l’ouest », il donne beaucoup de renseignements très intéressants sur l’agriculture bretonne d’avant les transformations du XIXème siècle, et cite même des mots bretons ; voici ce que l’on peut lire sur le bocage, ou le travail dans les landes (page 262) :


« dans plusieurs parties de la Bretagne on se sert du grand ajonc pour faire des haies ; ces haies seroient impénétrables si cet arbuste croissoit également, mais il laisse toujours des espaces vides, de sorte qu’on préfère le (263) marier avec d’autres arbustes pour former de bonnes haies ; pour établir des haies d’ajonc, on sème ses graines sur le sommet du talus formé par la terre qu’on a tirée du fossé. On sait, au reste, que, dans les provinces de l’ouest, comme peut-être dans tous les pays de pâturages, les propriétés sont séparées par des haies qui sont nécessaire pour empêcher les bestiaux de s’enfuir… (282) En arrivant dans le pays où la langue celte est encore conservée, je m’attendais à trouver quelques instruments particuliers à ces peuplades ; j’ai été en général frappé du soin avec lequel leurs instruments sont construits… Les instruments réellement propres à la Bretagne sont les etrèpes ou streps, parce que l’opération qui les a rendus nécessaires est heureusement bornée à ce pays : l’etrèpe est une tranche large et courte, dont le bord est fort coupant et dont le manche est disposé de manière à faire sur la lame un angle d’environ trente-cinq degrés. L’etrèpe de Vannes a les deux côtés arrondis et égaux ; celle de Quimper, qui porte le nom de mare, est proportionnellement plus étroite ; celle de Muzillac est très singulière, en ce que le côté se prolonge en une oreillette aiguë. Ces etrèpes servent à enlever la superficie de terre végétale (283) qui se forme sur les landes, et à couper le pied des ajoncs et autres arbustes qui s’y sont développés… (284) La principale exportation du Morbihan est du froment ; aussi la culture est-elle dirigée vers ce but, mais d’une manière toute particulière. Dans une ferme (et leur grandeur ne dépasse guère une cinquantaine d’hectares) on trouve un tiers de terres cultivées et deux tiers de landes. Cette proportion varie un peu selon les cantons… Dans les environs de Quimperlé et de Quimpercorentin où la culture est meilleure que dans le Morbihan, on ne trouve guère que la moitié ou le tiers des fermes qui sont encore en landes. Ces landes sont principalement couvertes du grand et du petit ajonc, du genêt à balai, de la bruyère ciliée et de la bruyère cendrée, etc. Elles servent au fermier sous trois rapports : 1°. En ce qu’il y met paître ses vaches ; 2°. En ce qu’il y recueille des fagots pour chauffer le four ; 3°. Sur-tout en ce qu’il en retire l’engrais destiné à la partie cultivée. La lande d’une ferme est divisée en quatre ou (285) cinq portions ; chaque année on enlève avec l’etrèpe dans une de ces portions la couche de terre végétale qui s’y est formée et les arbustes qui la recouvrent ; on mêle cette terre et ces arbustes avec le peu de fumier qu’on peut recueillir, on les entasse dans des lieux bas et humides, et lorsqu’ils sont à moitié pourris on s’en sert comme d’engrais pour les terres qu’on cultive : cet engrais est d’autant plus estimé qu’il y entre davantage de grand ajoncs et de genêt à balai ; mais quoique les paysans le sachent bien, ils ne se donnent point la peine de semer ces arbustes dans leurs landes. En général, dans le Morbihan, la même portion de terrain se cultive toutes les années sans jachères, et la partie qui est en landes reste toujours consacrée à cet emploi ; la végétation y est assez active pour que, dès la première année, une lande etrèpée se recouvre d’arbustes et de plantes qui y reforment de la terre végétale. Dans quelques cantons du Finistère, voisins du Morbihan, on alterne l’emploi des terres environs tous les neuf ans, de sorte que la partie qui étoit terre cultivée devient lande au bout de cette époque, et celle qui étoit lande devient terre cultivée… (286) Lorsqu’on veut cultiver une lande, on brûle les petits arbustes qui la recouvrent, afin de lui servir d’engrais… Dans tous ces départements, la culture des bords de la mer diffère de celle dont je viens de parler, soit parce que la proximité de la mer permet d’employer le goesmon comme engrais ; et par conséquent d’avoir moins de landes : soit parce que le manque de bois oblige d’employer comme combustible le fumier des animaux. Dans quelques villages, tel que dans les environs du bourg de Batz, on fait sécher contre les murs les fientes des vaches pour l’employer ensuite comme combustible… La partie des fermes qui est cultivée est ordinairement destinée alternativement une année (287) au froment ou au seigle ; l’année suivante au mil ou au blé noir. C’est l’usage seul de tel ou tel village, qui me paroît déterminer le choix du paysan pour le seigle ou le froment, le mil ou le blé noir. Une de ces récoltes sert à la nourriture du pays, l’autre à l’exportation. C’est un fait remarquable que, dans un pays dont une grande partie est habituellement en landes et où la population est assez considérable, il se fasse encore une exportation de blé… D’après ce tableau, on voit que le Morbihan manque des deux cultures qui lui sont les plus propres, les prairies et les forêts. (288) On trouve quelques prairies naturelles dans le département, mais en petit nombre. Nulle part on y voit des prairies artificielles… Faute d’une suffisante quantité de prairies, on n’a en général point assez de bestiaux, par conséquent point assez de fumiers, et de-la provient l’etrèpement des landes destinées à servir d’engrais. ».




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